Dominique de Villepin lance aujourd’hui la conférence sur l’emploi et les salaires en réunissant les partenaires sociaux sur ce thème, comme il l’avait promis cet été, alors que les revendications sur le pouvoir d’achat s’amplifiaient. Elles n’ont pas cessé depuis. Dans un sondage, 45 % des Français se disent préoccupés par le maintien de leur salaire
Tenir ses promesses, c’est bien. Mais on peut légitimement
se demander à quoi sert de discuter du pouvoir d’achat. Le pouvoir d’achat ne
se décrète pas ! Tenir une telle conférence peut alimenter les illusions
qu’il suffit de revendiquer pour voir son salaire augmenter et qu’à l’inverse,
si les salaires sont trop bas, que quelqu’un est responsable. Or, les choses ne
sont pas si simples, même si les Fabius et autres aimeraient bien le faire
croire. Cette conférence vise à montrer que l'on agit, mais renforce en même temps les douces illusions socialistes que tout se contrôle, que tout se décrète.
La richesse nationale, le PNB, c’est un gros gâteau. Il croît, année après année, mais plus très vite : en gros, de 2,0 à 2,5 % cette année. La croissance est induite par plusieurs facteurs : l’augmentation de la quantité de travail ou l’augmentation de l’efficacité du travail, i.e. la productivité. On peut décider du temps de travail : la gauche a limité la durée la durée de travail hebdomadaire à 35 h => cela va dans le sens d’une diminution de la production de richesse. Fillon augmente la durée de cotisation, donc la durée des carrières : cela va dans le sens d’une augmentation des richesses produites. Le chômage baisse : même résultat. Mais les mesures pour piloter la quantité de travail fournie en France sont à l’évidence ponctuelles. Sur la productivité, on peut tenter de l’améliorer, ce qu’a fait le gouvernement en instaurant par exemple les pôles de compétitivité, en améliorant la formation de la main d’œuvre avec les DIF, les droits individuels à la formation, issus de la loi du 4 mai 2004. Tout cela demande du temps, beaucoup de temps, et, avec une forte inertie, la croissance progresse bon an, mal an, de 2,0 % par an.
Reste que le gâteau doit être partagé. Là aussi, de fortes idées reçues persistent. Le CERC, qui a fait le bilan des inégalités en France, notait (P43) que la partage de la richesse entre les actionnaires et les salariés est stable en France : les deux-tiers de la richesse vont aux salariés, et cela depuis plus de 10 ans. Si les salaires progressent faiblement, ce n’est pas parce que le grand capital capte plus, c’est simplement parce que la croissance progresse faiblement ! Par ailleurs, quoi que l’on fasse, le partage de la valeur ajoutée reste constant, ce qui tend à prouver que ce partage ne se décide pas, en dépit des lois votées sur la « participation ». Encore une illusion…
Alors, que peut-on attendre d’une conférence sur l’emploi ? A priori, pas grand chose. Ce n’est pas là que l’on décidera de la croissance, donc de la taille du gâteau. Tout au plus peut-on partager un peu différemment le gâteau. C’est ce qui va se passer : les smicards demandent une augmentation du Smic, les cadres un effort vers les cadres… Le problème est donc le suivant : lors de conférences, on peut transférer des revenus, mais en créer, sûrement pas.
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